Le blog clarifi

Comment bien lancer son projet EPM ?

Le cadrage d’un projet de mise en œuvre d’une application EPM (application dédiée au pilotage et à la planification financière) est une phase déterminante. En effet, le cadrage est essentiel pour disposer d’une vision claire et partagée des objectifs et résultats attendus, ce qui est parfois négligé par empressement à démarrer la mise en œuvre.

Quelle démarche mener et quels réflexes adopter pour partir sur de très bons rails ?

Les conseils de l’équipe CLARIFI dans cet article.

Le terme EPM pour « Enterprise Performance Management » fait référence aux processus et pratiques de pilotage global des activités au sein d’une entreprise. Une solution logicielle dite EPM englobe généralement les fonctions suivantes :

  • La budgétisation et la planification
  • La modélisation de la création de valeur d’une entreprise
  • La consolidation des résultats et les reportings
  • L’analyse de la performance

Les solutions EPM sont utilisées en premier lieu par les équipes financières (contrôle de gestion ou FP&A principalement) mais aussi de plus en plus par les autres départements (RH, supply chain, ventes) grâce à leur capacité d’automatisation et de simulation et à leurs fonctionnalités collaboratives.

Le cadrage d’un projet EPM, ou phase de conception générale, comprend deux chantiers majeurs :

La validation du Business case et du choix du couple éditeur-intégrateur est une étape-clé du projet et permet le passage à la phase suivante de mise en œuvre de l’application EPM.

Bien sûr, si une solution est déjà exploitée dans l’entreprise, et qu’il s’agit d’une refonte d’application ou d’une extension du périmètre applicatif, la sélection de la solution éditeur et de l’intégrateur pourrait être sans objet.


Présentation générale de la phase de cadrage de projet EPM

Un projet EPM se compose de deux phases distinctes : la conception générale et la mise en œuvre.

La première phase dite de conception générale comporte 4 étapes :

Schéma de cadrage d'un projet EPM

La durée de cette phase est généralement est de trois à quatre mois.

Les facteurs clés de succès de cette étape en amont de la mise en œuvre effective du projet peuvent être résumés ci-dessous :

  • Une forte implication dès le début des contributeurs clés et moteurs dans les propositions de changement
  • La formalisation des rôles sur le projet entre sponsors, équipe projet centrale et contributeurs métiers ; à la fois pour la prise de décisions et pour les travaux à effectuer (conception, test, communication…). La disponibilité des contributeurs doit être confirmée en amont du démarrage des travaux
  • La conception générale doit se donner pour objectif l’automatisation de l’essentiel et non de la totalité des activités pour les processus à outiller (démarche 80-20)
  • L’objectif doit être de viser une liste ciblée d’éditeurs-intégrateurs (maximum 4) à solliciter dans la consultation pour le choix de la solution EPM à intégrer
  • Un pilotage interne du projet, non délégué à un prestataire externe

Voici ci-dessous une synthèse des livrables de conception générale, pour les 4 étapes précisées ci-dessus :


Lancement, spécifications générales et Business case

L’initialisation et le contenu du cadrage projet

La première étape consiste à formaliser un document de référence qui servira de base pour la réunion de lancement du projet.

Ce document devra particulièrement aborder et détailler les éléments suivants :

  • Les orientations et objectifs globaux visés avec la future solution et le projet à venir (en termes d’automatisation, unification de référentiels et process, productivité)
  • Le périmètre fonctionnel et le scope d’activités
  • La description de l’organisation des équipes autour du projet (sponsor, chef et équipe projets, contributeurs-clés) et des différents instances (comités de pilotage, comités projet, etc.)
  • Un macro-calendrier estimé pour le projet dans sa globalité
  • Des KPIs liées aux améliorations recherchées avec le nouvel outil

La deuxième étape consiste à recueillir et formaliser les besoins pour le futur outil.

Cette étape est très structurante pour la suite car en partant de l’état des lieux initial, c’est à ce moment que seront définies et précisées les attentes par les différentes parties prenantes du projet.

Durant cette étape de spécifications générales, il faut en particulier :

  • Collecter et hiérarchiser les besoins pour pouvoir avoir un inventaire précis des attentes (rapidité, standardisation, calculs, collaboration entre départements, etc..) à prioriser pour la future solution.
  • Aligner les différentes personnes décisionnaires sur cette priorisation
  • Définir les processus cibles et règles de gestion principales visées dans la nouvelle application (toujours en partant de l’existant)
  • Revoir et/ou définir le modèle de données cible
  • Définir le nombre d’utilisateurs cibles et le périmètre fonctionnel de la future application
  • Définir les liens avec les autres outils (interfaces entrantes-sortantes)
  • Définir l’environnement technique de la future application : localisation des serveurs (cloud…), sécurité, environnement web ou excel, etc.

Cette étape de spécifications générales aboutit à un cahier des charges qui sera validé par l’équipe projet et qui doit permettre de passer à l’étape d’appel d’offres auprès d’éditeurs et intégrateurs de solutions EPM.

Les enjeux du Business case

Le Business case, notamment pour sa partie financière, sera complétée à l’issue de la sélection de la solution EPM et de l’intégrateur.

Il est cependant initié au plus tôt et débute par la « mission statement » qui fixe les grandes orientations du projet pour la Direction générale, les sponsors, l’équipe projet et les contributeurs. Ce qui permet de valider l’étude de conception générale, le budget correspondant et son calendrier.

Les 3 enjeux du Business case sont :

  • La validation de la phase suivante de démarrage du projet
  • Le partage et la communication de la vision voulue avec le nouvel outil
  • L’implication et l’adhésion de tous les acteurs au sein de l’entreprise sur le projet

La définition de KPIs

Durant cette étape du cadrage du projet et en particulier de la formalisation du Business case, il est clé de déterminer un panel de KPIs qui doivent orienter les décisions et « benchmarker » le succès de la future solution par rapport à l’état initial avant le projet.

Plutôt que des KPIs projet de type coût / qualité / délai (respect du budget, du périmètre applicatif prévu, du calendrier), ces indicateurs permettent d’être orientés résultats opérationnels et de tracer les améliorations de manière tangible.

A titre d’exemple, voici quelques KPIs pouvant être retenus :

  • Le retour sur investissement du projet : ETP et nombre d’heures gagnées par tous les utilisateurs avec le nouvel outil
  • Le taux de fiabilité des données sources
  • Le taux d’adhésion à l’outil (% d’utilisateurs effectifs vs utilisateurs prévus)
  • Le taux d’usage de l’outil (% d’utilisateurs avancés / nombre total d’utilisateurs). Un utilisateur avancé ayant un usage de toutes les fonctionnalités de l’application
  • Le taux de satisfaction global des utilisateurs de l’outil
  • Le coût global annuel d’exploitation cible (à comparer vs le coût réel post projet)
  • Le niveau d’autonomie de l’entreprise par rapport aux prestataires externes


Choix de solution éditeur et choix d’intégrateur

Après l’élaboration du Business case et des spécifications générales de la future application, la dernière étape va consister à déterminer quel va être l’outil proprement dit retenu (choix de l’éditeur) et quel prestataire va assister l’entreprise à la mise en œuvre de la solution (choix de l’intégrateur).

L’intérêt d’une double sélection éditeur et intégrateur

La pratique conseillée dans la majorité des cas est de retenir un « couple » d’éditeur / intégrateur afin de ne pas faire reposer le choix sur la seule qualité intrinsèque de la solution. En effet, le succès du projet dépend autant de la pertinence de la solution par rapport au besoin que de la maîtrise technique et de la compréhension des attentes par l’intégrateur.

La responsabilité de l’éditeur (éventuellement déléguée à l’intégrateur) sera l’installation technique de la solution dans l’environnement de l’entreprise.

La mission de l’intégrateur sera le développement, le paramétrage et le déploiement de l’outil de l’éditeur de manière indépendante. Il portera la responsabilité de la bonne exécution du projet auprès de l’entreprise donneuse d’ordre.

Les étapes du processus de choix

La pratique est souvent de faire une pré-sélection de trois ou quatre éditeurs en fonction du cahier des charges rédigé.

Le choix des intégrateurs portera sur 3 à 4 également, à sélectionner en fonction de leur expertise relative sur chaque solution pré-identifiée.

Certains intégrateurs sont purement spécialistes d’une solution quand d’autres, souvent de taille plus importante, proposent leurs services pour plusieurs logiciels.

A cette étape de sélection, il est primordial de se baser sur un choix rationnel à partir d’une étude comparative rigoureuse, faite si besoin avec l’aide d’un prestataire externe indépendant des éditeurs et intégrateurs, intervenant en qualité d’AMOA.

La sélection éditeur-intégrateur aura lieu généralement en deux temps :

  • Première étape : pré-sélection après réception d’une proposition technique et d’une proposition tarifaire ;
  • Seconde étape : sélection finale après entretien souvent appelé « grand oral » pour notamment juger la démarche proposée de mise en œuvre, le profil des intervenants et la capacité de l’intégrateur à transposer les besoins de l’entreprise dans une architecture de l’application exploitant au maximum les fonctionnalités de la solution éditeur.

La sélection pourra être complétée par une demande par l’entreprise de POC (application « Proof of concept ») auprès des candidats.

Une grille de notation multi-critères permet de comparer les couples finalistes :

Grille d'évaluation pour le choix d'un prestataire

Il faut compter un minimum de 2 mois pour conduire le processus d’appel d’offres, jusqu’à la négociation prix et la contractualisation avec l’éditeur et l’intégrateur.

Le mode de contractualisation intégrateur : forfait ou régie 

Deux modes de contractualisation peuvent être utilisés pour la mise en œuvre opérationnelle de l’application par l’intégrateur :

  • Le contrat au forfait se traduit par un tarif figé dès le démarrage de l’intervention en contrepartie d’un engagement sur des résultats (livraison de l’application)
  • Le contrat en régie sera un tarif de mise à disposition de ressources pendant une période dédiée au projet. Le prestataire s’engage sur des moyens

Les pratiques les plus courantes, notamment dans des projets sur des durées longues, sont des contrats au forfait, avec des jalons de facturation correspondant à la mise à disposition progressive de lots de fonctionnalités ou au déploiement progressif par pays ou branche d’activités.

Conclusion

En résumé, le succès final d’un projet de mise en place d’un outil EPM sera déterminé bien sûr par la qualité de l’équipe projet, l’adéquation de la solution et l’adhésion et la montée en compétences de la communauté d’utilisateurs de l’outil.

La phase de cadrage que nous venons de détailler dans cet article est tout aussi primordiale car c’est à ce moment que sont identifiées et sélectionnées les fonctionnalités-clés de l’outil et de nombreux projets échouent par sur ou sous – dimensionnement de ces éléments et objectifs.

Il restera à la suite de cette étape à bien manœuvrer deux phases de transition critiques :

  • Basculement du cadrage à la mise en œuvre avec une recomposition de l’équipe projet (arrivée de l’intégrateur, passage en mode projet, communication avec les utilisateurs, gestion des priorités)
  • Passage du mode projet au mode exploitation ou « mode run »

Christophe Maupu & Benoît Chandelier, décembre 2022